Le Sacre ou le Couronnement

Jacques-Louis David (1748-1825)
Plume, encre noire, lavis gris. Montage de Niodot (Lugt 1961 a).
Signé à la plume, encre noire, en bas à gauche : »David f. et in. 1805″
H. 25,8 ; L. 40,5 cm
Inv. 291, acquisition 1994

Commandé par Napoléon, sans destination précise, dès octobre 1804, « Le Sacre de Napoléon » (titre complet : « Le Couronnement de l’empereur Napoléon Ier et de l’impératrice Joséphine dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 2 décembre 1804 » ; musée du Louvre) illustre la cérémonie du 2 décembre 1804 en la cathédrale Notre-Dame. Des trois autres tableaux prévus, un seul, « La Distribution des Aigles« , sera réalisé (château de Versailles). David, le peintre de « La Mort de Marat » (musées royaux des beaux-arts de Belgique ; copie Atelier de David au château de Versailles), que la réaction thermidorienne avait jeté en prison, était revenu aux sujets antiques avec « Les Sabines » (musée du Louvre), quand il trouva en Bonaparte le héros moderne que la peinture attendait. Après un portrait inachevé (1797-1798, musée du Louvre) et une évocation équestre du passage du Saint-Bernard (1800, château de Malmaison), « Le Sacre » ouvrait une voie nouvelle pour l’artiste, qui trouva dans ce sujet « plus de ressources pour la peinture » qu’il ne s’y attendait. Il était d’ailleurs stimulé par le succès de son élève Gros, dont le « Napoléon visitant les pestiférés de Jaffa » (musée du Louvre), sujet contemporain haut en couleurs, triomphait au Salon de 1804.

« Peinture-portrait », comme il le nommait, « Le Sacre » fut exécuté avec l’assistance de Georges Rouget sur une vaste toile de 6,21 mètres sur 9,79, plus grande croyait-il (à tort) que « Les Noces de Cana » de Véronèse (musée du Louvre). Commencé le 21 décembre 1805, dans un atelier installé dans l’église de l’ancien collège de Cluny, place de la Sorbonne, il fut achevé en novembre 1807 et retouché au début de 1808. Exposé seul au Louvre, puis au Salon de 1808 (page en anglais), il fut montré encore en 1810 pour le Concours décennal, mais le mariage de l’Empereur cette année-là, avec l’archiduchesse d’Autriche Marie-Louise de Habsbourg Lorraine, rendait impossible son installation dans un palais : le tableau le plus célèbre de l’Empire n’aura été vu par le public que pendant six mois au plus…

Signé et daté 1805, ce dessin préparatoire capital est le plus abouti des trois connus offrant la composition entière, qui tous montrent encore l’empereur se couronnant lui-même. Le peintre tenait à ce geste hardi, d’ailleurs conforme à la réalité, mais qui donnait de Napoléon une image arrogante et provocatrice : Gérard, portraitiste bien en cour, lui suggéra de modifier sa figure et de montrer l’Empereur couronnant son épouse, ce que David fit sur la toile même. Napoléon, qui vit là « une petite intrigue de Joséphine avec David », devait féliciter le peintre d’avoir fait de lui un « chevalier français. » De César, il devenait Bayard…Ici, on ne voit pas Madame Mère, notoirement absente le jour du sacre, qu’elle désapprouvait : Napoléon exigera qu’elle soit représentée. Le pape, mitre en tête, bénit : David renonça ensuite à ce geste, que Napoléon lui fit rétablir en janvier 1808. C’est à ce stade que la composition fit l’objet d’une esquisse peinte à l’huile sur bois, détectée sous le « Portrait de Pie VII et du cardinal Caprara » du musée de Philadelphie (page en anglais).

Sylvain Laveissière, conservateur en chef du département des Peintures au Louvre, 2004
Sylvain Laveissière est l’auteur notamment de Le Sacre de Napoléon peint par David, Paris, musée du Louvre, 2004 (en collaboration)
Photos © Fondation Napoléon – Patrice Maurin-Berthier

Lire un complément sur le tableau final, conservé au Musée du Louvre.

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