Fusil de chasse de Napoléon Ier
Jean Le Page (1746-1834)
Signé Le Page à Paris – Arquebusier de l’Empereur
Inscription gravée « Ile d’Aix le 15 juillet à 8 heures du soir 1815 »
Noyer, argent, or, fer, acier, cuir
L. 133 cm
Inv. 1111, donation Lapeyre
Ce grand fusil de chasse fut offert par Napoléon au capitaine Besson le 14 juillet 1815 en guise d’ultime remerciement pour avoir organiser une tentative d’évasion vers les Etats-Unis. Il a probablement été fait graver par un des fils du capitaine ; ce dernier n’aurait pas fait la confusion entre le jour de ce don et le 15 juillet, jour du départ de Napoléon en route vers son exil à Sainte-Hélène, à bord du Bellérophon. Après la défaite de Waterloo le 18 juin 1815 et son abdication le 22 juin, Napoléon était parvenu le 3 juillet suivant à Rochefort où deux frégates, « La Saale » et « La Méduse », avaient été mises à sa disposition par le gouvernement provisoire pour le conduire aux Etats-Unis. Alors que l’attente des sauf-conduits se prolongeait et devant l’incertitude du sort de l’Empereur réfugié sur l’île d’Aix, plusieurs projets d’évasion lui furent soumis dont celui du lieutenant de vaisseau Jean-Victor Besson (1781-1837). Ce dernier se proposait d’embarquer Napoléon sur « La Magdalena », un brick portant pavillon danois, propriété de son beau-père, qui transportait de l’eau de vie pour le compte de la maison Pelletreau de Rochefort. Deux barriques vidées et capitonnées avaient été aménagées pour servir de cachette en cas d’arraisonnement par les Anglais. Accepté par Napoléon, le projet donna lieu à un contrat fictif d’affrètement signé entre Besson et Las Cases. Le 13 juillet, alors que le départ était prévu pour la nuit même, Besson fut informé par Napoléon de sa décision de se livrer aux Anglais. Les bagages furent déchargés dans la journée du 14 et, dans la soirée, Napoléon reçut Besson qui donna plus tard le récit des événements et de cette dernière entrevue : « Dès que l’Empereur me vit entrer, il vint à moi et dit : « Capitaine, je vous remercie à nouveau, aussitôt que vous vous serez rendu libre ici, venez me voir en Angleterre. J’y aurai encore sans doute, ajoutait-il en souriant, besoin d’un personnage de votre caractère […] alors, il prit parmi les armes pour son usage personnel qui se trouvaient dans un angle de la pièce, un riche fusil à deux coups qu’il avait emporté longtemps à la chasse et, tout en me le tendant, il me dit d’une voix émue : « Je n’ai plus rien dans ce monde-ci à vous offrir mon ami, que cette arme. Veuillez l’accepter comme un souvenir de moi ». « La Magdalena » appareilla le soir même sans son illustre passager et franchit sans être inquiétée la croisière anglaise. Destitué à la Restauration, Besson s’essaya sans enthousiasme au commerce maritime puis se mit au service de Méhemet Ali, terminant sa carrière comme vice-amiral et major général de la flotte égyptienne. Transmis de génération en génération, le fusil de Napoléon est resté dans la famille Besson jusqu’ en 1977, date de sa mise en vente à Drouot et de son acquisition par Martial Lapeyre.
Photos © Fondation Napoléon – Patrice Maurin-Berthier