Bourses d’études 2017

BOURSES PREMIER EMPIRE

  • Elisa BACCINI, Langue et culture dans l’Italie napoléonienne.
    Thèse sous la dir. du prof. Alfredo VIGGIANO (Université de Padoue – Italie).
    Cette thèse a pour but d’analyser les aspects et les implications de la politique linguistique napoléonienne en Italie, en réponse à des questions sur les moyens de mise en œuvre et la réception des initiatives linguistiques napoléoniennes. Ces initiatives intéressaient tous les territoires italiens qui étaient de diverses manières sous influence française : les départements annexés directement à l’Empire, le Royaume d’Italie et le Royaume de Naples.
    Ces travaux aboutiront à une analyse globale, en se concentrant sur le fonctionnement des organismes gouvernementaux, mais sans négliger d’autres domaines dans lesquels une langue est exprimée : sociabilité, théâtres, presse, système scolaire. Quant à la question de la politique culturelle, notre recherche tente de tester sur le terrain linguistique la rigidité et la cohérence du prétendu impérialisme culturel napoléonien. Cette thèse espère apporter une contribution au fondamentale débat historiographique sur le (présumé) caractère agressif et abstraite du gouvernement français des pays annexés. Même après la fin de la domination française, la question linguistique en Italie n’a pas perdu de sa vigueur, fortement relancée par la question nationale, au contraire. Notre recherche s’attachera à la compréhension de la relation entre la politique linguistique de Napoléon et la reformulation du problème de la langue dans l’Italie de la Restauration et du Risorgimento.
  • Emmanuelle BORDURE, Formes et espaces de l’architecture religieuse entre 1760 et 1848 : le cas des églises paroissiales en Ile-de-France.
    Thèse sous la dir. du prof. Alexandre GADY (Université Paris – Sorbonne).
    Dans le vaste ensemble d’études sur l’art de la période dite néo-classique, l’architecture religieuse est demeurée quelque peu délaissée. À ce jour, aucune réflexion sur les édifices cultuels n’a été encore menée sur l’ensemble de cette période, couvrant presque un siècle. Ce constat nous amène à proposer un travail de recherches sur l’évolution de l’architecture religieuse produite entre 1760 et 1848, et reposant sur l’étude du type particulier de l’église paroissiale francilienne.
    Le choix d’une période d’étude longue a été fait afin de réévaluer la rupture couramment admise entre XVIIIe et XIXe siècle. Il s’agit de faire le lien architectural entre les différentes périodes de l’histoire, depuis la fin de l’Ancien Régime qui voit les formes de l’architecture sacrée se régénérer, notamment avec l’église de la Madeleine et Saint-Philippe du Roule, jusqu’à la monarchie de Juillet, durant laquelle mûrissent les principes de l’architecture néo-gothique, en passant par le Premier Empire et la Restauration.
    L’objectif de notre étude est de suivre l’évolution stylistique de l’architecture des églises paroissiales sur un siècle « à l’antique », en identifiant les chefs-d’œuvre et les modèles, et en mettant en valeur la diversité de cet art sur le territoire francilien. Ainsi, ce patrimoine méconnu et délaissé, enfermé dans le mot-valise de néo-classicisme, trop souvent réduit à l’usage de la colonne et du fronton, sera réévalué au profit d’un ensemble plus riche et complexe, ensemble dont les contradictions expriment une tension permanente entre glorification du divin, archéologie des formes et modernité architecturale.
  • Killian HARRER, La Vierge et les frontières. Les pèlerinages marials à travers l’Europe révolutionnaire et napoléonienne.
    Thèse sous la dir. du prof. Suzan DESAN (Université Wisconsin-Madison – USA).

    Pour les uns, c’est une forme de fanatisme qui franchit et menace les frontières, déjà instables, des États révolutionnaires et impériaux. Pour les autres, c’est la quête d’une grâce puissante et rassurante que la Vierge procurera dans un temps de bouleversements. En tout cas, entre 1789 et 1815, les grands pèlerinages posent très souvent problème aux gouvernements qui cherchent à asseoir de nouvelles réalités (géo)politiques, et au catholicisme qui essaie de se réinventer. Le but précis de cette thèse consiste à mettre en lumière les enjeux du pèlerinage marial à l’échelle européenne, au travers des exemples suisse (Einsiedeln), italien (Lorette) et polonais (Jasna Góra).
    Comment les divers tournants de la politique façonnent-ils le vécu religieux qui garde pourtant une dynamique propre ? En effet, de la régionalisation au rapprochement entre exil et pèlerinage, de la féminisation à la militarisation, nombreux sont les processus pour lesquels les foyers du culte marial constituent autant de laboratoires importants. Quand les autorités s’opposent à la « superstition », elles cherchent certes à juguler la dévotion à la Vierge, sans toujours y réussir. En revanche, une fois arrivé au pouvoir, Napoléon prend initialement des mesures conciliatoires, par exemple en rétablissant l’abbaye d’Einsiedeln. Pour saisir les effets de ces basculements, la recherche s’appuiera sur des enquêtes croisées dans les archives des institutions religieuses et des administrations étatiques.
  • Marco Emanuele OMES, La sacralisation politique de Napoléon Bonaparte au moyen de célébrations publiques civiles et religieuses (1799-1815). Etude comparée à l’échelle européenne.
    Thèse sous la dir. des prof. Daniele MENOZZI et Jacques-Olivier BOUDON (Ecole Normale Supérieure de Pise Italie – Université Paris IV Sorbonne).

    La recherche vise à analyser, dans une perspective comparative, les divers moyens – principalement fêtes et modifications de la liturgie des fonctions religieuses – grâce auxquels Napoléon Bonaparte est progressivement glorifié et sacralisé non seulement dans l’Empire, mais aussi à l’échelle européenne, ce qui inclut par conséquent les états satellites comme l’Italie, l’Espagne, la Hollande et l’Allemagne. On essaiera donc d’évaluer l’impact des célébrations publiques comme instrument de renforcement de la personnalité de Napoléon, comme méthode de représentation de son pouvoir, des fondements et des buts de ce dernier, et enfin comme principal moment de sacralisation de la personne de l’empereur et de son projet politique.
    Le travail s’inscrit dans la lignée des approches de l’histoire culturelle de la politique ; il s’agit de comprendre comment le pouvoir s’organise et se manifeste dans la société autour d’idées, de valeurs, de symboles et de rites, afin de garantir sa stabilité et sa légitimité. Puisque l’histoire napoléonienne s’avère caractérisée par une vraie dimension européenne, il devient impératif d’offrir une analyse comparative des projets festifs des gouvernements des pays occupés par les Français et des réactions des populations locales face aux manifestations de changement de régime, aussi bien que d’examiner quelle image de Napoléon et de son autorité est répandue dans des contextes hétérogènes.
  • Zachary STOLTZFUS, Publication des biens : hypothèque et la mobilisation du crédit en France Moderne.
    Thèse sous la dir. du prof. Rafe BLAUFARB (Florida State University – USA).

    Mon étude porte sur le crédit, l’essence économique de l’Ancien Régime et de la France post-révolutionnaire. Plus précisément, elle examine la forme de crédit prédominante en France : les accords de crédit foncier dans lesquels les prêts suivaient la partie du bien immobilier utilisée comme garante, ce système étant connu sous le nom d’hypothèque en France. Comme l’ont montré des historiens tels que Clare Crowston et Michael Sonenscher, le crédit était vital à tous les niveaux de l’Ancien Régime et de l’économie révolutionnaire. Le fonctionnement de l’hypothèque a cependant été modifié par la Révolution française.
    Mes recherches font l’hypothèse que le crédit personnel et de réputation de l’Ancien Régime, exploré par Crowsten, été remplacé pendant la Révolution française par un système de crédit hypothécaire remanié, dans lequel la terre et les prêts impersonnels attachés à la terre étaient greffés dans un nouveau régime juridique transparent, exigeant l’enregistrement officiel, la publication et le suivi de ces prêts. Cette étude cherche donc à réviser fondamentalement notre compréhension du rôle du crédit dans l’Ancien Régime et la France post-révolutionnaire, ainsi que les effets à long terme de sa redéfinition juridique pendant la Révolution française. Cette thèse explore la montée de l’hypothèque dans l’Ancien Régime, le développement d’un nouveau système d’hypothèque pendant la Révolution française, la clarification de ce nouveau système par le Code Napoléon, et sa signification durant la première moitié du XIXe siècle.
  • Marta TOMCZAK, Relations entre centre et périphéries sur l’exemple du fonctionnement du Duché de Varsovie dans le Premier Empire français.
    Thèse sous la dir. du prof. Jaroslaw CZUBATY (Université de Varsovie – Pologne)

    L’objectif scientifique principal de l’étude consiste à examiner les effets de la politique française sur ses périphéries en général, en prenant l’exemple du Duché de Varsovie et les changements du droit civil introduit par le Code Civil en 1804. Selon l’hypothèse proposée, c’est le degré de l’efficacité des réformes juridiques dans l’esprit napoléonien qui détermine si un pays peut être considéré comme terrain périphérique. L’exemple du Duché de Varsovie semble particulièrement intéressant pour comprendre les relations centre – périphéries, car les terres polonaises n’ont pas été administrées directement par les fonctionnaires français; de plus, la France n’a jamais réclamé les droits sur ces terres. En conséquence, la comparaison des effets de la politique parisienne exercée dans le duché avec ceux affectant les autres territoires gérés de manière plus directe, comme l’Italie, nous permettra non seulement de caractériser la politique française envers ses périphéries en général, mais aussi d’évaluer quel type de coopération avec la périphérie était plus efficace, dans l’esprit français, de point de vue de la mise en œuvre des réformes.

BOURSES SECOND EMPIRE

  • Bourse « MINOU AMIR-ASLANI » 2016 : Magalie MYOUPO, La sainteté laïque au XIXème siècle : une utopie littéraire.
    Thèse sous la dir. du prof. Paule PETITIER (Université Paris Diderot VII).
    Ce travail de recherche prend la forme d’une enquête sur une figure récurrente tout au long du xixe siècle : celle du saint laïque. De nombreux textes, romanesques et historiographiques, font affleurer un personnage auquel ils donnent une dimension d’exemplarité particulièrement développée qui n’est pas exempte d’une transcendance réinventée. Si elle vise une finalité qui la dépasse, qu’elle ait pour nom « République », « art » ou « science », l’existence la plus humble peut accéder à la sainteté. L’imaginaire hagiographique est réinvesti pour exprimer de nouvelles valeurs.Le personnage du saint laïque qui réunit a priori deux notions inconciliables hérite de deux phénomènes. Il relève en partie de la résurgence d’un catholicisme fort liée notamment à la Restauration. Ce mouvement a pour corollaire, dans le monde des lettres, le retour en grâce de la matière chrétienne, dont Génie du christianisme de Chateaubriand, publié en 1802, constitue la première manifestation. D’autre part, sa sécularisation est liée au mouvement de réaction contre l’Église catholique – et notamment la compagnie de Jésus – qui s’amorce dès les années 1840. Du romantisme social au naturalisme, de Michelet en passant par Sand, Sue, Lamartine et Zola, les historiens et écrivains investissent cet imaginaire hagiographique non plus pour célébrer l’Ancien Régime et la permanence de ses valeurs, mais pour diffuser, sous une forme connue, une nouvelle éducation polémique basée sur un principe d’émancipation et non plus d’imitation. Cela aboutit à la création de « saints modernes » pour reprendre la belle expression de Michelet dans son cours au Collège de France du 18 janvier 1844. Figures symboliques de l’avenir forgées par les adversaires de la tradition, ces saints se voient dotés d’une valeur puissante : grâce au pas qu’ils font dans le monde profane, ils paraissent capables de porter le rêve d’une communauté et de reconstituer du lien social. Par ailleurs, en un siècle de désenchantement, la « resymbolisation* » moderne des structures narratives et des motifs hagiographiques dont ils sont les supports questionne la nécessité persistante de l’imaginaire religieux pour faire communauté.* Claude Millet, Le Légendaire au XIXe siècle : poésie, mythe et vérité, Paris, Presses universitaires de France, Coll. Perspectives littéraires, p. 25.

En 2012, la Fondation Napoléon et Me Ardavan Amir-Aslani sont convenus que, pendant cinq ans, une bourse d’études de la Fondation Napoléon porterait le nom de Mme Minou Amir-Aslani.
Minou Amir-Aslani, née à Téhéran le 18 janvier 1935 et décédée à Paris le 13 septembre 2010, fut une grande dame passionnée de littérature et d’histoire. Particulièrement intéressée par l’histoire de la Révolution française et du Premier Empire, elle éprouva un réel intérêt pour la vie de l’Empereur Napoléon Ier et du rôle joué par ce dernier dans la codification des lois et dans l’organisation du système judiciaire français. Née en Iran à un moment déjà trouble de l’histoire de ce pays, elle n’a cessé, tout au long de sa vie, passée principalement en France et en Allemagne, d’œuvrer pour l’ouverture d’esprit et de l’acceptation de l’autre dans sa différence. Admiratrice de l’enseignement de l’histoire et du droit en France, pays de tradition de droit civil qui influença le système judiciaire et le droit positif de son pays d’origine, elle a toujours accordé le plus grand respect à la recherche universitaire. Elle considérait que la seule voie qui valait la peine d’être empruntée était celle de la quête de la connaissance, garante de l’indépendance d’esprit et de la liberté de ceux qui choisissaient de la prendre.