Bourses d’études 2013

BOURSES D’ÉTUDES PREMIER EMPIRE

  • Raphaël CAHEN : La pensée politique de Friedrich von Gentz (1764-1832)
    Thèse d’Histoire sous la dir. des prof. Michel GANZIN, Eric GASPARINI et Henning OTTMANN
    (Université Aix-Marseille et LMU Münich Allemagne)

    Friedrich von Gentz (1764-1832) était un fonctionnaire prussien né en Silésie, un publiciste, expert des finances et de l’économie politique, un diplomate autrichien et un homme d’État. Après le congrès de Vienne en 1814-1815, devenu le « secrétaire de l’Europe » tout en restant un intellectuel indépendant, c’est un orientaliste à la tête de la politique ottomane de l’Empire Autrichien de 1821 à la fin de sa vie. Il reste aussi un penseur et acteur de premier plan des réseaux antirévolutionnaires et anti-napoléoniens en Europe. Cet ancien étudiant de Kant est enfin un européen convaincu et un Casanova franco-allemand.
    Après une partie bibliographique dans laquelle correspondances et sources inédites sont mises en valeur, la première partie de la thèse porte sur l’étude de la formation intellectuelle de Friedrich von Gentz et sur la mise en perspective de sa pensée politique post-lumière d’opposition modérée à la Révolution française. L’accent sera aussi porté sur la diffusion de cette pensée.
    La deuxième partie est tournée sur l’analyse de la pensée et de l’action en faveur de l’ordre et de la stabilité pour la « république européenne » du « secrétaire de l’Europe ». Son rôle dans la théorisation et la création du concert des puissances et de l’ordre de Vienne en tant qu’institution de maintien de la paix et de la sécurité en Europe est ainsi mis en exergue, ainsi que la période plus conservatrice de sa pensée politique à travers son rôle dans les décrets de Carlsbad (1819) et la conférence de Vienne (1820) avec son interprétation restrictive de l’article 13 de la Confédération germanique.
    Enfin, sa position favorable aux mouvements révolutionnaires des années 1830 et le cœur de sa pensée politique fondée sur l’idée de réconciliation des extrêmes et de réformes progressives des régimes politiques et des constitutions seront analysés à la fin de la thèse.

  • Gonzague ESPINOSA-DASSONNEVILLE : Maximien Lamarque (1770-1832), Général d’Empire, député des Landes. Essai biographique
    Thèse d’Histoire sous la dir. du prof. Natalie PETITEAU
    (Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse)

    Jean-Maximien Lamarque reste en marge de l’histoire du Premier Empire si ce n’est pour la prise de Capri (1808) et la pacification de la Vendée (1815) ou par ses funérailles sanglantes de juin 1832, immortalisées par Victor Hugo dans Les Misérables, qui le font passer pour un républicain. Sa vie a été souvent survolée par des notices biographiques, son prénom écorché et aucune biographie concrète n’a été faite sur ce personnage consciencieux, ferme et humain, habile à parler, à écrire, à négocier.
    Loin d’être un simple général d’Empire vagabondant « dans des guerres sans gloire », son caractère digne et sa manière de mener la contre-guérilla furent généralement appréciés par ses adversaires calabrais, catalans et vendéens. Imprégné des idées des Lumières et des idéaux de la Révolution, tout en défendant Napoléon, il se donne pour sacerdoce, sous la Restauration, la défense des proscrits et des demi-soldes, veillant aux acquis de 1789 et au souvenir de l’Empire. Il écrit avec fougue comme il dirige les combats, sa renommée dans l’opposition le pousse vers les portes de la Chambre des Députés en 1828, où il se distingue.
    L’objet de cette étude est de décrire, à l’aide de ses archives personnelles et de ses écrits, la double carrière militaire et politique, d’un homme défenseur de la liberté et de la patrie, cultivé, profondément humaniste, plein d’esprit, consacrant la Restauration comme une halte dans la boue. Homme d’ordre aux idées modérées, il voulait des changements et non des bouleversements.

  • Élodie GOËSSANT : George Watson-Taylor (1771-1841), Collectionneur de peinture
    Thèse d’Histoire de l’art sous la dir. du prof. Barthélémy JOBERT
    (Université Paris IV-Sorbonne)

    Bien que peu connue, la collection Watson-Taylor fut indiscutablement l’une des plus importantes des années 1820 en Angleterre. Elle se distingue par la personnalité particulière de son créateur. La rapidité avec laquelle George Watson-Taylor acquit de nombreux chefs-d’œuvre à la fois en peinture, sculpture, mobilier et arts décoratifs, est une prouesse à elle seule. Au cours des guerres de l’Empire, les œuvres d’art en Europe furent l’objet d’enjeux considérables et leur afflux sur le marché de l’art fut sans précédent. Ceci profita à la France mais aussi au marché de l’art londonien qui émergea à cette période. En sept ans, entre 1815 et 1821, Watson-Taylor parvint, grâce à son ami William Seguier, à créer une collection aussi prestigieuse et intéressante que celles des grandes familles aristocratiques dont il côtoyait les descendants. Cependant, la fortune de Watson-Taylor reposant sur un marché instable et sur le déclin, cette prouesse lui coûta cher. Il dépensa sans compter et subit un revers de fortune en 1832. Il dut alors tout vendre.
    Au cours de sa carrière de collectionneur, Watson-Taylor acquit près de trois cent cinquante tableaux, parmi lesquels des chefs-d’œuvre tels que le Paysage à l’arc-en-ciel de Pierre-Paul Rubens (The Wallace Collection), la Marchande de crevettes de William Hogarth (National Gallery, Londres) et la Vierge à l’Enfant avec Saint Jean-Baptiste et Saint Jérôme dit aussi La Vision de Saint Jérôme du Parmesan (National Gallery, Londres).
    Les bouleversements que provoquèrent les campagnes de Napoléon, permirent cette émergence de nouveaux collectionneurs non aristocrates. En France, ce furent notamment les maréchaux d’Empire ; en Angleterre ce furent les planters, les banquiers ou les grands négociants qui, souvent, furent aussi parlementaires

  • Camille ROUGIER : La surveillance politique dans les départements côtiers du Consulat et de l’Empire (1800-1814). Étude comparée de quatre départements de l’Ouest et du Nord de la France (Gironde, Loire inférieure, Finistère et Nord)
    Thèse d’Histoire sous la dir. du prof. Jacques-Olivier BOUDON
    (Université Paris IV-Sorbonne)

    Nos recherches se concentrent principalement sur l’appareil de surveillance départemental, les nombreux acteurs qui composent cet appareil, les méthodes et pratiques employées pour approcher les habitants, pour saisir des informations politiques et en rendre compte aux ministères (cycle du renseignement). Nous nous intéressons également à la conception que les agents entretiennent à l’égard de leurs missions et surtout leur efficacité, réelle ou supposée, dans la surveillance de départements côtiers difficiles à appréhender.
    Cette question de l’efficacité pousse à observer l’entretien et la répartition du budget pour la police des départements, à analyser la concurrence qui existe entre les diverses institutions chargées de la surveillance, et voir comment les autorités parviennent à s’adapter aux différents terrains d’investigation et répondent aux difficultés comme la barrière des patois et des langues régionales, le manque d’agents ou de moyens financiers.
    Enfin, comment elles parviennent à surmonter la défiance qu’elles suscitent auprès des administrés, peu enclins à voir s’immiscer dans leurs affaires quotidiennes un État de plus en plus présent et contraignant. S’interroger sur leur efficacité, c’est s’interroger sur la production des savoirs engendrés par le renseignement. Quelles informations les agents locaux parviennent-ils à rassembler ? Quelles intrigues et quels complots parviennent-ils à déjouer ? Leurs constatations concordent-elles avec l’état véritable de l’opinion publique ? L’attitude frondeuse de certains départements, comme la Gironde, montre que malgré le zèle et la bonne volonté des agents, les résultats obtenus sont souvent loin des objectifs initiaux.

BOURSE D’ÉTUDES SECOND EMPIRE

  • Bourse « MINOU AMIR-ASLANI » 2013 : Benoit HABERT : La protection des libertés publiques sous le Second Empire
    Thèse d’Histoire du droit sous la dir. des prof. François SAINT-BONNET et Brigitte BASDEVANT-GAUDEMET
    (Universités Paris II Assas et Paris XI- Sceaux)

    Lorsque Louis-Napoléon fait son coup d’État le 2 décembre 1851, il entend rester fidèle à son serment du 20 décembre 1848 et garantir une démocratie. Mais celle-ci passe de libérale à autoritaire, malgré la promesse que le nouveau régime entend apporter aux libéraux : les libertés publiques, « libertés reconnues et garanties par l’État qu’elles soient individuelles ou politiques », seront bien assurées d’une existence légale ou du moins réglementaire. La Constitution du 14 janvier 1852 commence, dans ce sens, par cette reconnaissance, au sein de son Titre IV et le Sénat est censé en être le protecteur.
    Mais différentes sensibilités contestent l’équilibre prôné par le Second Empire en matière de libertés publiques. Dans la lignée de penseurs, tels que Benjamin Constant ou Alexis de Tocqueville, qui réfutent la possibilité d’une protection des libertés publiques par l’État dans l’œuvre révolutionnaire et napoléonienne, la nouvelle génération de libéraux entend séparer libertés de la société de toute intervention de l’État, en dehors du canal politique. L’article 291 du Code pénal limitant le droit d’association devient dès lors leur combat contre le Second Empire. Les orléanistes, eux, comptent renforcer les libertés politiques et parlementaires. À ces tensions s’ajoutent celles que connaît en propre le libéralisme napoléonien qui évoluera au cours du règne de Napoléon III, de 1852 à 1870, et dont un témoignage se trouve dans le rôle du juge judiciaire en matière de protection des libertés.
    Cette thèse entend étudier ces différentes formalisation des protections publiques par le régime du Second Empire, tout comme ces diverses influences qui façonnent ou s’opposent à la vision institutionnelle de cette période.

    La Fondation Napoléon et Me Ardavan Amir-Aslani sont convenus que, pendant cinq ans, une bourse d’études de la Fondation Napoléon porterait le nom de Mme Minou Amir-Aslani.
    Minou Amir-Aslani, née à Téhéran le 18 janvier 1935 et décédée à Paris le 13 septembre 2010, fut une grande dame passionnée de littérature et d’histoire. Particulièrement intéressée par l’histoire de la Révolution française et du Premier Empire, elle éprouva un réel intérêt pour la vie de l’Empereur Napoléon 1er et du rôle joué par ce dernier dans la codification des lois et dans l’organisation du système judiciaire français. Née en Iran à un moment déjà trouble de l’histoire de ce pays, elle n’a cessé, tout au long de sa vie, passée principalement en France et en Allemagne, d’œuvrer pour l’ouverture d’esprit et de l’acceptation de l’autre dans sa différence. Admiratrice de l’enseignement de l’histoire et du droit en France, pays de tradition de droit civil qui influença le système judiciaire et le droit positif de son pays d’origine, elle a toujours accordé le plus grand respect à la recherche universitaire. Elle considérait que la seule voie qui valait la peine d’être empruntée était celle de la quête de la connaissance, garante de l’indépendance d’esprit et de la liberté de ceux qui choisissaient de la prendre.

BOURSES D’ÉTUDES PREMIER – SECOND EMPIRE

  • Florence GRIMALDI : Les représentations de Napoléon dans la littérature britannique de la première moitié du XIXe siècle : les œuvres de Walter Scott et de William Hazlitt
    Thèse d’Histoire sous la dir. du prof. Francis BERETTI
    (Université Pascal Paoli – Corse)

    L’objectif de cette étude est de tenter de cerner les origines du mythe napoléonien à travers deux ouvrages : la biographie de Napoléon par Walter Scott (The Life of Napoleon Buonaparte) publiée en 1827, soit six ans après le décès à Sainte-Hélène de l’empereur déchu, et celle qui fut composée par William Hazlitt de 1828 à 1830 et qui s’intitule également The Life of Napoleon Buonaparte.
    La constitution d’une bibliographie spécifique et d’une recherche documentaire incluant des ouvrages critiques veut permettre de mieux appréhender les apports et les fonctions de ces deux biographies dans la création du mythe napoléonien. Cette analyse se fera sous la forme d’un triptyque de la genèse de l’œuvre, des circonstances de leur composition et de l’impact produit chez les contemporains.
    La question du point de vue des auteurs est une problématique au cœur de cette étude afin de comprendre leur position vis-à-vis de leurs compatriotes et de l’ensemble de la production consacrée à la vie de Napoléon. Parallèlement, la motivation de ces auteurs à écrire sur Napoléon révèle leurs opinions et sentiments ambivalents, voire contradictoires, à l’égard de cette figure emblématique.
    En s’attachant à l’analyse de ces deux ouvrages relativement peu étudiés jusqu’à présent, cette étude cherche à approfondir les représentations de Napoléon, ce personnage historique qui ne laisse pas de fasciner.

  • Maria MNATSAKANOVA : Napoléon dans la pensée des historiens et écrivains russes à la fin du XIXe – au début du XXe siècle
    Thèse d’Histoire sous la dir. du prof. Jacques-Olivier BOUDON
    (Université Paris IV-Sorbonne)

    La période qui s’étend de la fin du XIXe siècle au début du XXe siècle peut être considérée comme « l’âge d’or » de l’historiographie russe. Cette thèse a pour objectif d’étudier, durant cette période, l’évolution de la perception du personnage historique de Napoléon et de son Empire. Elle sera divisée en trois parties.
    La première traitera de la période du début du XIXe siècle jusqu’à la publication de Guerre et Paix de Tolstoï. Pendant les guerres de coalition contre la France, coalitions dont faisait partie la Russie, les auteurs russes avaient dépeint Napoléon comme l’incarnation du mal et l’antéchrist dans de nombreux pamphlets. Cette vision ne dura pas après la chute du Premier Empire et la mort solitaire de l’Empereur à Sainte-Hélène ; au contraire, elle fait place à la figure du nouveau Prométhée trahi par ses proches et vaincu par la fatalité que la compassion chez les jeunes intellectuels slaves associent à Napoléon. Cependant, l’historiographie officielle (Nicolas Mikhaïlovski-Danilevski et Modeste Bogdanovitch) restait très dépendante de la censure de Nicolas Ier : il n’était pas question que la politique étrangère de son prédécesseur, Alexandre Ier, soit analysée ou critiquée. Les chercheurs officiels s’attachaient donc aux aspects purement militaires l’épopée napoléonienne.
    Il fallait attendre la fin du siècle, objet d’une deuxième partie de cette étude, pour voir une évolution dans l’historiographie autorisée. Marquée non seulement de l’affaiblissement du contrôle exercé par les autorités mais aussi par le rapprochement diplomatique de la France et de la Russie, cette période voit les chercheurs russes travailler dans les archives françaises et entretenir des correspondances avec leurs collègues étrangers. L’exemple le plus caractéristique en est la correspondance entre le grand-duc Nicolas Mikhaïlovitch et Frédéric Masson.
    La troisième partie sera dédiée aux changements de perception de l’époque impériale chez les intellectuels russes (écrivains, poètes et philosophes) après la révolution bolchévique, qu’ils soient restés en Russie ou aient émigré.