Bourses d’études 1999
BOURSES D’ÉTUDES PREMIER EMPIRE
- Natalya GOUTINA : Le général Gazan (1765-1845)
Thèse d’histoire contemporaine
Sous la direction du Professeur Jean Tulard
Ecole Pratique des Hautes EtudesLe général Gazan est resté jusqu’à ce jour un des « oubliés de la gloire »; il n’existe aucune étude sérieuse sur sa carrière qui mérite toutefois d’être connue du grand public. Il fut un des grands généraux du Premier Empire, un de ceux qui contribuèrent de façon décisive à faire changer la face de l’Europe. On le voit à l’armée du Rhin combattre « des rois conjurés »; en Vendée pourchassant les hommes de Charrette; à Zurich au siège de Gênes aux côtés de Masséna. Puis on le rencontre en Europe Centrale avec la Grande Armée et en Espagne où il restera jusqu’à la première abdication de l’Empereur. Une carrière brillante, riche en expériences, fabuleuse à raconter, et injustement négligée par les historiens.
Les recherches s’organiseront autour de neuf lignes directrices :
- Les origines (1765-1780). Ses études au collège de Sorèze, célèbre à l’époque, pour comprendre les facteurs qui le déterminèrent à préférer la carrière des armes
- Sous l’Ancien Régime (1780-1789). Développement des idées politiques de Gazan au début de la Révolution qui le pousseront à s’engager dans l’armée républicaine. L’esprit politique de son régiment (canonniers garde-côtes d’Antibes) est très important pour comprendre son engagement.
- Aux armées de la Révolution (1789-1799). Les grades militaires successifs qui le mèneront à celui de général de brigade en avril 1799, à travers les opérations militaires sur le Rhin et dans l’Ouest.
- Dans le sillage de Masséna, justement réputé pour être un des meilleurs généraux de son temps. La recherche se concentrera sur les relations entre les deux généraux et l’expérience acquise par Gazan au cours de la campagne en Suisse et du siège de Gênes dans l’ombre de ce grand général.
- Séjour en Italie (1800-1805). Du point de vue de sa participation aux tâches liées au service et de son développement personnel.
- La Grande Armée (1805-1807). Rôle de la division Gazan pendant les campagnes, notamment aux batailles de Durrenstein, d’Iéna et d’Ostrlenka.
- La guerre d’Espagne (1808-1814). Gazan resta pendant six ans en Espagne et finit la guerre sous les murs de Toulouse le 10 avril 1814 en qualité de chef d’état-major de l’armée des Pyrénées. Examen détaillé de ses expériences, de ses opinions, de sa conduite, et des opérations qu’il a menées dans la Péninsule.
- Les Cent-jours. Le retour de Napoléon fut une grande épreuve de loyauté pour tous ceux qui avaient servi sous ses drapeaux; il est intéressant d’étudier de ce point de vue la conduite de Gazan.
- Sous la Restauration (1815-1845). Ses activités à la Chambre des Pairs, ses relations avec la nouvelle cour, leur influence sur sa carrière, et ses sentiments envers le régime de Louis-Philippe, en comparaison avec ceux d’autres généraux de l’Empire.
Les sources d’informations sur le sujet choisi sont abondantes. Du dossier Gazan aux archives du Service Historique de l’Armée de Terre (Château de Vincennes) aux lettres du général à ses collègues, ses amis et sa famille. Il est nécessaire de consulter également les dossiers de ses camarades et supérieurs comme Masséna, Lannes, Suchet, etc. Les autres sources à explorer sont constituées par les correspondances et mémoires des officiers ayant servi sur le même théâtre des opérations que Gazan, et surtout de ceux qui le connurent en personne.
Enfin l’étude et la traduction des mémoires russes, notamment ceux du général Ermolov, paraissent utiles, d’une part pour comparer les points de vue des côtés adverses, et d’autre part pour révéler au public français des récits d’une grande valeur historique jusque-là inconnus en France.
Diplômée d’instruction supérieure à la faculté des Langues Etrangères de l’université d’Etat de Petrozavodsk (Russie), Natalia Goutina prépare sa thèse d’histoire à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes sous la direction du Professeur Jean Tulard.
- David CHAILLOU : La politique sur la scène : l’Opéra de Paris 1810-1815
Thèse d’histoire contemporaine
Sous la direction du Professeur Jean Tulard
Université de Paris IVL’époque choisie correspond aux dernières années de l’Empire, du mariage de Napoléon avec Marie-Louise d’Autriche (13 décembre 1810), au retour définitif de Louis XVIII en 1815. D’une part elles sont riches en rebondissements institutionnels ; d’autre part elles correspondent au moment où l’Empire place l’art lyrique sous son entière dépendance. Comment ces musiques de propagande vont-elles suivre le déclin de l’Empereur, son retour, puis à nouveau son échec ? Que devient la propagande musicale quand le pouvoir change de mains ?
L’angle d’observation ne pouvait être que l’Opéra, un des lieux privilégiés de la vie parisienne sous l’Empire et le début de la Restauration. Y être joué constituait un passage quasi obligé pour un musicien avide de reconnaissance. L’Opéra était par ailleurs soumis à l’attention personnelle de l’Empereur. « J’entends qu’aucun opéra ne soit donné sans mon ordre », aurait-il déclaré en 1810 au surintendant des spectacles. Son lien particulier avec le pouvoir donnait à chaque œuvre représentée une résonance politique, celle de la glorification plus ou moins détournée de l’autorité en place. L’Opéra de Paris est, pourrait-on dire, l’endroit où l’Histoire parle et chante.À la mise en scène purement théâtrale s’ajoute celle de la présence du souverain dans les lieux du spectacle. Napoléon organise son image. Chaque événement important trouve une répercussion sur la scène de l’Académie Impériale. Lors de la première venue de Marie-Louise à l’Opéra le programme est minutieusement adapté à l’événement. Les entrées et sorties de l’Empereur sont préparées et accompagnées de musiques particulières qui interrompent la représentation. Le spectacle se déplace dans la salle et le principal héros se trouve être l’Empereur.
Les œuvres représentées sont tantôt composées à la faveur d’un événement précis (ex. : Le Triomphe du mois de mars ou le Berceau d’Achille, opéra, tableau allégorique, musique de Kreutzer, joué pour la naissance du roi de Rome le 27 mars 1811), tantôt elles exaltent indirectement, par le biais de l’allégorie, le pouvoir (exPelage ou le Roi de la Paix, musique de Spontini, parole de Jouy, représenté le 23 août 1814 au moment du retour des Bourbons).
C’est donc en offrant une confrontation des temps anciens et des temps présents que le théâtre pouvait se transformer en une remarquable arme de propagande.
Le pouvoir utilisa de façon consciente la musique pour influencer l’esprit public. La préparation des spectacles assumée par le directeur de l’Académie sous les ordres du surintendant de la musique est à cet égard très significative.
L’étude des œuvres représentées offre une image neuve des époques qu’elles illustrent.
Le choix des thèmes traduit la récurrence de certains éléments qui éclairent sur la nature des régimes et la représentation idéale que le pouvoir impose au public. A contrario, les absences et les sujets sensibles soigneusement évités sont pour l’historien d’un intérêt non négligeable (l’Espagne en 1812 par exemple). Ainsi failles et forces apparaissent sublimées par la musique et la pompe du spectacle.Titulaire d’un DEA d’Histoire Contemporaine (mention Très Bien), chargé de cours à l’université de Paris IV, David Chaillou effectue sa thèse sous la direction du Professeur Jean Tulard.
BOURSES D’ÉTUDES SECOND EMPIRE
- Christine DOTAL : Jean-Joseph Perrraud (1819-1876)
Thèse d’histoire de l’art
Sous la direction du Professeur Paulette Choné
Université de Bourgogne à DijonLa sculpture française du XIXe et en particulier celle qui se développe sous le Second Empire sont encore trop souvent mal connues, voire dénigrées. En 1979, l’exposition sur l’Art en France sous le Second Empire amorçait la recherche sur ce sujet et laissait percevoir l’existence d’un véritable phénomène artistique sous le Second Empire. En 1986, l’ouverture du Musée d’Orsay et l’exposition du Grand Palais, La sculpture française au XIXe siècle, mettaient au jour l’importance de cet art. D’autres manifestations plus récentes, notamment l’exposition rétrospective sur le sculpteur Préault, démontrent l’importance des études monographiques, indispensables à la compréhension d’un courant artistique. Le plus souvent, le Second Empire est globalement intégré au études sur le XIXe siècle. « Pompier », « Néo-classicisme tardif » ou encore « Eclectisme » continuent malheureusement parfois à définir négativement l’art de cette période.
Si de nombreux courants se développent sous le Second Empire, le style néo-classique demeure la première référence esthétique du gouvernement. Les programmes architecturaux (le Nouveau Louvre, l’Opéra, les gares) que l’on doit à Napoléon III sont de grands chantiers pour les sculpteurs. La persistance de la sculpture néo-classique dans les Salons illustre le goût de l’Etat qui démontre là encore par ses achats le succès de ce style. Cette politique artistique permet la découverte de talents et la survie de bon nombre d’entre eux.
Le choix d’une figure célèbre représentant la sculpture néo-classique sous le Second Empire n’est pas fortuit. Jean-Joseph Perraud (1819-1876) suit le parcours exemplaire d’un artiste officiel. Après son apprentissage à Salins (Jura) puis à Lyon, il est reçu à Ecole des Beaux-Arts de Paris en 1843, dans l’atelier de Ramey et Dumont. Il remporte le premier Grand Prix de Rome en 1847 et part pour Rome à la fin de la même année. Il y reste cinq ans pensionnaire de l’Académie de France sous le directorat d’Alaux. De retour en France en 1852, il présente régulièrement des œuvres au Salon où il obtint la médaille d’honneur à deux reprises. Plusieurs œuvres lui sont achetées ou commandées par l’Etat sous le Second Empire, l’Enfance de Bacchus, le Désespoir. Il participe au décor du Louvre, de l’Opéra, de la Bibliothèque Nationale et d’autres établissements publics. En 1865 il est élu membre de l’Académie des Beaux-Arts en remplacement de Nanteuil.
L’étude scientifique et stylistique des œuvres révèle le véritable rôle de l’Etat dans le développement de la sculpture néo-classique, elle permettra de dresser un tableau des artistes dits néo-classiques, soit par le sujet de leur oeuvre, soit par le style qu’ils utilisent : Cavelier, Guillaume, Gumery, Elias-Robert, Thomas, Millet, Jouffroy. Tous ces artistes bénéficièrent de nombreuses commandes de l’Etat.
Le style néo-classique du Second Empire a sa véritable originalité empreinte du goût de Napoléon III mais aussi d’autres courants, cet art n’est pas le pastiche, et de l’art gréco-romain , et de l’art du Ier Empire. Prôné par l’Institut ce style résiste aux autres courants, romantisme, réalisme, sans se scléroser comme on a souvent voulu l’avancer.
Titulaire d’une maîtrise et d’un DEA d’histoire de l’art, Christiane Dotal est chargée de missions aux musées des Beaux-Arts de Besançon en 1996, et de Lons-le-Saulnier en 1997.