Prix 2010

2010PrixHaegelePRIX PREMIER EMPIRE

Vincent HAEGELE, Napoléon et Joseph Bonaparte, le pouvoir et l’ambition, Paris, Tallandier

Personnage contrasté, souvent incompris, malheureux dans sa carrière militaire, Joseph Bonaparte souffre d’une image négative en regard de la légende qui auréole la statue de son frère cadet Napoléon. Pourtant, l’aîné de l’empereur fut le soutien permanent de son élévation et un pilier du nouveau régime instauré après le coup d’État du 18 Brumaire. Homme politique aux convictions modérées, influencé par les idées des penseurs des Lumières, mais aussi les théories de Germaine de Staël, Joseph est un personnage incontournable de la vie politique française. Roi de Naples en 1806, puis roi d’Espagne en 1808, il s’attache à allier les principes du système de famille napoléonien à ses propres conceptions du pouvoir. Mais il ne parvient pas à éviter les tensions avec le maître de l’Europe et se mue peu à peu en un opposant résolu. Cette étude, qui se fonde sur les archives personnelles de Joseph, sa correspondance et des témoignages de contemporains, aborde successivement l’éducation parallèle des deux frères, leur parcours sous la Révolution, l’opposition menée par Joseph dans les premières années de l’Empire, son  » laboratoire  » napolitain, l’échec espagnol ainsi que les jours sombres de la Campagne de France.

 

2010PrixSecondEmpirePRIX SECOND EMPIRE

Gabriel BADEA-PAÜN, Le style Second Empire, Paris Éditions Citadelles et Mazenod

Lorsque l’impératrice Eugénie visita le chantier de l’Opéra, elle crut bon d’interroger Charles Garnier sur les sources historiques du décor qu’il avait conçu : « Mais quel style est-ce donc ? Ce n’est pas antique, ce n’est pas Moyen Âge, ce n’est pas Renaissance. » « C’est Second Empire, Madame », répondit l’architecte. Cette esthétique nouvelle régie par l’éclectisme constitue un style autonome, complexe, subtil et très créatif. C’est une façon de se nourrir sans exclusivité de l’apport du temps passé tout en le renouvelant. L’historicisme artistique et décoratif procède à des citations stylistiques mêlant des sources variées, historiques, des styles qui se sont succédé de la Renaissance à la fin du XVIIIe siècle, et géographiques, notamment orientales, ainsi que des techniques et des matériaux multiples, dans une polyphonie souvent déconcertante. Reflet de cet éclectisme ambiant, le style Second Empire est aussi un mode de vie dont le confort est le dénominateur commun. Le solennel côtoie souvent le confortable dans une société qui, par son esprit, cultive une mondanité qui s’étend à toute la bourgeoisie. Ce livre original ouvre aux lecteurs les portes des salons de palais et d’hôtels particuliers qui firent la splendeur du Second Empire et sa renommée internationale, comme le palais des Tuileries, les châteaux de Saint-Cloud, de Compiègne ou de Pierrefond, ceux des Rothschild à Ferrières et Waddesdon Manor, les fastueuses résidences des Vanderbilt, etc.

 

2010PrixLievenPRIX DU LIVRE NON FRANCOPHONE

Dominic LIEVEN, Russia against Napoleon. The True Story of the Campaigns of War and Peace, Ed. Penguin Books

Le livre de Dominic Lieven, professeur d’études politiques russes contemporaines à la London School of Economics, est extrêmement bienvenu dans la longue liste des ouvrages consacrés à la Campagne de Russie de 1812 et à ses conséquences au cours des deux années suivantes. Le titre du livre exprime parfaitement l’étendue de l’étude, allant de Tilsit à la Première Abdication en 1814. Lieven a raison de souligner le non-sens de se limiter à la seule année 1812, alors que le conflit (et la victoire finale russe) ne s’arrête pas à la Bérézina. La place accordée dans ce livre aux points de vue russes est aussi très importante. La richesse des mémoires français sur le sujet, et l’obsession des XIXe et XXe siècles autour de la personne de Napoléon, ont pesé lourd dans la balance jusqu’à présent. Le livre de Lieven est par conséquent plus qu’utile. En plus d’être écrit dans un style engagé, il est aussi particulièrement convainquant dans son utilisation des sources de l’histoire militaire russe (histoire des bataillons, mémoires personnels), et dans sa concentration sur ce qui est sans doute la plus grande (et la plus méconnue) victoire russe sur les problèmes de logistique et d’approvisionnement. Parmi les plus intéressantes pages de Lieven, certaines révèlent en effet l’effort conséquent et l’habileté déployée par les Russes pour trouver des solutions aux problèmes soulevés par le déplacement des hommes et des vivres, et la nécessité de fournir en grand nombre chevaux et munitions, et ce à travers de vastes distances, comme les moyens de transports à vapeur n’existaient pas encore. Un autre des apports importants du livre de Lieven s’attache à montrer la qualité de l’armée russe (et pas seulement en son légendaire caractère stoïque), ses capacités dans les opérations de reconnaissance à cheval (face aux performances françaises traditionnellement faibles) et sa grande maîtrise de la retraite stratégique, montrée plus qu’une fois pendant la période 1812-1814. Les amateurs purs et durs de militaria se délecteront des appendices réunissant les ordres de batailles de 1812 et 1813, tandis que les historiens pourront s’immerger dans la bibliographie détaillée et la longue liste de lectures complémentaires. Comme la revue The Economist, nous estimons que l’ouvrage de Dominic Lieven est un véritable livre de référence.