Prix 1996

PRIX PREMIER EMPIRE

Jean-Luc GOURDIN, L’ange gardien de Bonaparte, le colonel Muiron, Paris, Éditions Pygmalion / Gérard Watelet
Fils de Fermier général, petit-fils du premier chirurgien de Louis XV, Jean-Baptiste Muiron grandit au souffle du vent d’Amérique et de la Guerre d’Indépendance. C’est son oncle, Alexandre Gérard, qui signe avec Franklin le traité d’alliance entre la vieille monarchie française et les jeunes États-Unis du Nouveau Monde.
Au moment où la Révolution éclate, Muiron n’est âgé que de quinze ans, mais il est déjà sous-lieutenant d’artillerie. Malgré les multiples liens de sa famille avec la noblesse, il s’enthousiasme et prend fait et cause pour la République.
L’arme à laquelle il appartient le conduit à rencontrer bientôt un jeune capitaine de cinq ans son aîné : Napoléon Bonaparte. Il devient le premier de ses fidèles et dès lors ne cessera plus d’être présent à ses côtés. A Toulon, en décembre 1793, Muiron contribue avec éclat à la reprise de la ville. Blessé, il rejoint pourtant Paris en toute hâte pour sauver son père de la guillotine. Le 13 Vendémiaire, il défend la Convention contre la réaction royaliste. Enfin, en Italie, le général Bonaparte le choisit pour aide de camp.
Le 15 novembre 1796, sur le pont d’Arcole, Jean-Baptiste Muiron s’interpose entre la mitraille autrichienne et Bonaparte, sauvant ainsi son Général d’une mort certaine. Sa glorieuse disparition le fait entrer dans la légende.
C’est sur la frégate « La Muiron » que Bonaparte revient d’Égypte, parvenant miraculeusement à échapper à la flotte anglaise. Un mois plus tard, il s’empare du pouvoir. Napoléon n’oubliera jamais son valeureux aide de camp. Superstitieux et amoureux de la Providence, il ira même jusqu’à l’identifier à sa fortune et à son étoile. Il élèvera son père au rang de comte d’Empire, fera de « La Muiron » un monument historique et, aux heures de la déchéance, souhaitera prendre le nom de son ami de jeunesse. Enfin, à Sainte-Hélène, aux derniers jours d’une vie prodigieuse, il lui dédiera l’ultime codicille de son testament.
A Paris, face à l’avenue de la Grande Armée, l’un des immenses bas-reliefs de l’Arc de Triomphe représente le colonel Muiron protégeant Bonaparte sur le pont d’Arcole. Force est de reconnaître que, sans lui, la France n’aurait jamais connu Napoléon…

 

PRIX SECOND EMPIRE

Pauline PREVOST-MARCILHACY, Les Rothschild bâtisseurs et mécènes, Paris, Flammarion
La période du Second Empire est pour les Rothschild particulièrement brillante, surtout du point de vue artistique. Malgré des années difficiles (1850-1855), au cours desquelles Benoît Fould s’allie avec les Péreire pour fonder le Crédit Mobilier, libérant ainsi Napoléon III de la tutelle des banques privées, James de Rothschild réussit pendant la même période à se faire une place incontestée, et à acquérir une véritable stature d’homme d’État ou d’ambassadeur privilégié auprès des gouvernements des différents pays. Son indépendance financière lui permet en effet de mener seul ses opérations à bien. La cohésion familiale renforcée pendant toute la première moitié du XIXe siècle lui donnera une puissance inégalée.
Ses entreprises seront nombreuses et fructueuses : le développement de la Compagnie du Nord, véritable épine dorsale de son empire, l’amène à faire reconstruire la gare du Nord par l’architecte allemand J.T. Hittorff ; ce sera l’occasion de démontrer, une nouvelle fois, aux yeux de tous qu’il peut édifier des monuments aussi importants que ceux que le régime impérial fait élever dans le pays.
La décennie 1850-1860 est une période de construction intense, au cours de laquelle plusieurs des demeures qui firent la réputation de la famille virent le jour en Angleterre : Mentmore, Aston Clinton et l’hôtel 148 Piccadilly à Londres, en France les châteaux de Boulogne et de Ferrières, l’aménagement des hôtels 33 faubourg Saint Honoré et 4 rue Saint Florentin à Paris, en Suisse l’édification du château de Prégny. La reconstruction de Ferrières, édifice emblématique du Second Empire, inauguré par Napoléon III en 1862, fait de James de Rothschild le modèle même du mécène imité à travers le monde. Ferrières, construit par le célèbre architecte anglais Joseph Paxton, plus connu pour ces constructions industrielles, que pour son parcours académique, associe des références françaises, anglaises, et italiennes, devenant le symbole de ce cosmopolitisme européen dont les Rothschild sont les plus représentatifs.
Leur rôle dans le domaine de la santé, de la religion, qui s’affirme sous le Second Empire et se poursuit sous la Troisième République est exemplaire et dépasse largement le cadre de la bienfaisance pour s’ériger en véritable politique sociale (construction de quatre hôpitaux à Paris, rue de Picpus, à Berck dans le Pas de Calais, à Genève, à Vienne en Autriche, qui comptent parmi les plus modernes d’Europe). La synagogue de la rue Notre-Dame-de-Nazareth, financée par James de Rothschild, fut l’un des premiers édifices édifié dans le style néo byzantin en France, où il allait triompher pendant plusieurs décennies.
La mort de James en 1868 marque un tournant et la fin de l’Europe des Rothschild : la maison de Naples n’existe plus depuis 1862, la branche allemande s’est éteinte avec la mort d’Amschel en 1855 (ce sont les branches italiennes et autrichiennes qui dirigeront la maison de Francfort). La personnalité très forte de James lui avait assuré un rôle de premier plan, que ses descendants ne devaient pas retrouver.

Pauline Prevost-Marcilhacy est diplômée d’études supérieures de l’Ecole du Louvre.
Docteur en histoire de l’art de l’université Paris IV-Sorbonne où elle a enseigné de 1992 à 1996. Auteur de plusieurs articles sur l’architecture et le décor, elle a été en outre consultante pour l’aménagement du nouveau musée à Waddesdon (1992-1994), pour l’exposition Rothschild à Francfort (1994), commissaire-adjoint de l’exposition « Paris à la Belle Epoque » (Tokyo, 1985), et commissaire de l’exposition « Paris et ses fontaines » (Paris, 1995). Cet ouvrage est issu de sa thèse de doctorat soutenue en 1992.